Avec les mesures plus systématiques de la qualité de l’air, on s’aperçoit que les lieux où il est possible de respirer à pleins poumons se raréfient. Bord de mer, montagne, campagne ne sont plus toujours exempts de polluants ou d’allergènes. Quel est l’impact de la pollution de l’air sur la santé humaine ? Quels sont les facteurs aggravants ? Où mieux respirer ?

L’air, c’est la vie. Mais c’est aussi désormais un facteur de mortalité. L’Organisation mondiale de la santé est claire sur le sujet : la pollution de l’air est la cause de 7 millions de décès chaque année. La moitié de ces décès est liée à l’exposition à la pollution de l’air intérieur. L’autre moitié à la pollution de l’air extérieur. La pollution de l’air entraîne en effet des maladies cardio-vasculaires, des accidents vasculaires cérébraux, la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO), des cancers du poumon, des infections respiratoires aiguës.
La qualité de l’air est aussi responsable de l’augmentation des allergies et de l’asthme. Or, toujours selon l’OMS, dans le monde, 9 personnes sur 10 respirent de l’air pollué !

Des risques pour qui ?

Les enfants, les femmes et les personnes âgées sont les populations les plus vulnérables lorsque l’air est dégradé. « Un grand nombre de pathologies qui prennent racine dès l’enfance, et même dès le stade fœtal (asthme, allergies, eczéma, syndromes dépressifs, diabètes, obésité…), sont directement liées à la pollution de l’air » écrit l’Unicef.
Plus fragiles, les enfants sont aussi davantage exposés dans les agglomérations urbaines, où les écoles et autres lieux d’accueil sont en majorité situés à proximité de grands axes routiers.
Or, « le trafic automobile » est la « principale source de pollution atmosphérique » en ville, rappelle le rapport qui précise aussi que la pollution a une incidence directe sur la circulation sanguine, le cerveau et l’immunité.

Des inégalités sociales et géographiques

Mais les inégalités sont aussi sociales et géographiques. Selon l’OMS, près de 90 % des décès liés à la pollution de l’air surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, et près de deux décès sur trois surviennent en Asie du Sud-Est et dans les régions du Pacifique occidental.  Respirer l’air de New Delhi pendant une journée équivaut ainsi à fumer une quarantaine de cigarettes sans en allumer une seule… On imagine l’effet que cela produit sur un bébé. Mais ce n’est pas mieux en Europe, où vivre à proximité des sources de pollution augmente également les risques. Quinze à 30 % de nouveaux cas d’asthme
chez l’enfant surviennent en raison de la présence d’axes routiers très denses près de leurs
lieux de vie.

Les activités humaines en cause

La qualité de l’air peut certes dépendre de phénomènes naturels, comme les émissions de dioxyde de soufre et d’oxydes d’azote des volcans, la dispersion des pollens, les nuages de sable des déserts. Mais il s’agit d’événements ponctuels, non cumulatifs.
La révolution industrielle, en revanche, a gravement pesé sur la dégradation de la qualité de l’air. Parmi les causes principales, on compte en effet les modes de transport à moteur, qu’ils soient terrestre, aérien ou maritime, les combustibles ménagers, la combustion des déchets, les centrales électriques alimentées au charbon, les usines… et les activités industrielles. Aussi les grands pollueurs sont-ils les pays hyper industrialisés et peu soucieux de l’impact environnemental, rentabilité oblige. Les États-Unis par exemple, pour préserver leur puissance économique, rechignent à adapter leurs modes de production aux enjeux à long terme.

La politique du ciel bleu

Pourtant, certains pays très pollueurs commencent à faire d’autres choix. Après s’être targuée, il y a quelques années, d’inaugurer une centrale à charbon par jour, la Chine a décidé en 2018 de limiter fortement l’exploitation de ce minerai, qui fournit encore plus de 60 % de son électricité.
La politique du “ciel bleu” a pour objectif de limiter l’utilisation de charbon de manière drastique dans plusieurs régions. Or, lorsque les politiques mettent la priorité sur la qualité de l’air, ce choix influe directement sur la santé des populations. Ainsi, à Tokyo, deux ans après l’interdiction des véhicules diesel (décidée en 2003), la concentration en particules fines avait diminué de 44 % et la mortalité cardiovasculaire avait chuté quant à elle de 11 %.
Selon l’Unicef, on améliorerait grandement la santé des populations en mettant en place des ZFE, des zones à faibles émissions, où la circulation est réduite à des horaires clés et certains véhicules interdits, aux abords des crèches et écoles, des gymnases et des hôpitaux. Le problème, c’est que l’air n’appartient pas à une “zone”…

La pollution n’a pas de frontières

Le nuage de Tchernobyl a bien traversé l’Europe. Le charbon produit en Allemagne passe régulièrement au-dessus de nos têtes. « Il n’y a pas de frontières dans les masses d’air et tout ce qui est produit se diffuse, se répand » explique le Pr Gasperi, maître de conférences au Laboratoire eau, environnement et systèmes urbains (LEESU, université Paris-EstCréteil). Résultat : on peut trouver des particules polluées très loin de leur lieu d’émission, dans un milieu isolé, difficile d’accès, éloigné des villes et de toute activité industrielle.
Une étude française menée par l’Ecolab de Toulouse au beau milieu du parc naturel régional des Pyrénées ariégeoises a mesuré à 1 425 mètres d’altitude, en pleine montagne, des taux de microplastiques dans l’air équivalents à ceux mesurés à Paris et à Dongguan, en Chine ! Le vent, la pluie et la neige les ont amenés jusque-là. De même, n’en déplaise à M. Trump, 96 % des parcs nationaux américains sont affectés par une pollution atmosphérique aussi importante que celle des grandes villes, occasionnant des troubles pour la santé des visiteurs et des dégâts importants dans ces parcs naturels. La pollution va partout et ne fait pas de discrimination : elle nuit aussi bien à l’homme qu’aux animaux et à la végétation.

Alors, où respirer ?

Puisque les masses d’air véhiculent la pollution, il faut donc éviter les zones où stagnent ou se déposent les particules, comme les endroits encaissés. Sur le littoral, le vent chasse la pollution ailleurs. Les côtes atlantiques, balayées par des vents d’ouest dominants, sont donc plutôt bien loties, les masses d’air se déplaçant vers l’intérieur des terres, qui récoltent, elles, polluants et pollens. Les côtes méditerranéennes, le Var et le Vaucluse, si le Mistral ne les disperse pas, reçoivent des nappes de pollution venant de l’est, notamment de la zone industrielle de la plaine du Pô en Italie. En montagne, même si l’on peut y retrouver des polluants, on peut dire que l’on respire globalement mieux qu’en plaine, surtout si on ajoute à cela que les acariens ne survivent pas au-delà de 1 500 mètres d’altitude. Bref, mieux vaut un coin venté, et sur le bon versant… Pour choisir – quand on peut choisir – le plus simple reste de consulter les bulletins publiés par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

L’été en apnée

Mais un même endroit peut d’une saison à l’autre passer du vert au rouge. L’hiver, Paris connaît ses plus grands pics de pollution. Dans le Sud de la France par contre, c’est la chaleur estivale, combinée à un important trafic routier, qui rend certains endroits irrespirables, en favorisant la formation d’ozone, un gaz irritant pour les yeux et les voies respiratoires. Heureux sont ceux qui peuvent rester sur les bords de mer et  bénéficier d’une petite brise salvatrice pour les poumons. La campagne ? Guère mieux, car l’ozone qui se forme au-dessus des villes s’accumule en été dans les zones rurales en raison de phénomènes photochimiques. « Les moyennes peuvent parfois être supérieures à la campagne qu’en ville », confirme Stéphane Socquet, responsable des études d’Atmo Rhône-Alpes, l’organisme agréé pour la surveillance de la qualité de l’air de la région. La campagne n’est pas non plus idéale pendant les moissons quand on est asthmatique ou allergique, ou encore pendant les périodes d’épandage de pesticides et d’engrais. L’air citadin de son côté est un peu plus respirable l’été, quand la ville se vide de ses habitants et donc de ses flux de voitures.
Ainsi, les destinations estivales ne sont le plus souvent pas celles qui permettent un vrai bon bol d’air…

Et demain ?

Respirer en été, si on aime la chaleur, n’est donc pas la meilleure option “santé”. Rappelons d’ailleurs qu’il est déconseillé d’avoir une activité physique par forte chaleur et lors de pics de pollution. Mais quid de la rentrée, des mois et des années à venir ? La qualité de l’air est, à juste titre, l’une des premières préoccupations environnementales des Français. Avec un sentiment d’impuissance. On peut certes covoiturer, limiter ses déplacements, ne pas brûler ses déchets végétaux ni asperger son environnement de produits chimiques, désodorisants compris. Mais la responsabilité des États est aussi en question.
En mai 2018, la Commission européenne a d’ailleurs renvoyé six États devant la justice de l’UE (la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie, la Hongrie et la Roumanie), pour non respect des normes de qualité de  l’air. L’air est aujourd’hui à la fois une question de santé, d’économie, de politique et, si on ne change rien, une question de survie…

JE RESPIRE, DONC JE SUIS

Au début des années 1960, Leonard Orr s’intéresse à la respiration des yogis, et expérimente, dans sa baignoire, une respiration consciente de son souffle. Il remarque qu’en contrôlant celui-ci, son corps et son esprit se détendent, le libèrent du passé et du futur pour le replacer dans l’instant présent. Au fil des années, il mettra en place des séances thérapeutiques et fera évoluer son approche, aujourd’hui appelée la “respiration consciente”. Le principe, comme son nom l’indique, consiste à prendre des respirations en pleine conscience durant toute la durée de “l’inspir”, puis celle de “l’expir”, sans laisser l’esprit se disperser. Cette pratique permet ainsi de développer un silence intérieur et une présence à soi contribuant notamment à réduire le niveau de stress ou d’anxiété, à se libérer des blocages psychologiques et à contrôler ses émotions. Le yoga ou le Qi gong, notamment, invitent à pratiquer la respiration consciente régulièrement comme outil d’éveil spirituel. Adaptative, elle peut se faire dans toutes les circonstances et situations de la vie, afin de pouvoir traverser celles-ci dans des conditions optimales !

Yoga :http://www.ffey.fr / Qi Gong : www.france-qigong.org

LA BPCO, PRIORITÉ DE SANTÉ PUBLIQUE

La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) tue cinq fois plus que les accidents de la route. Cette infection pulmonaire atteint les bronches, puis est caractérisée par une obstruction lente et progressive des voies aériennes et des poumons. Elle a pour origine le tabagisme dans 80 % des cas. Les autres cas sont dus aux inhalations toxiques d’origine professionnelle ou environnementale : les solvants, les poussières (charbon, ciment, métal, céréale), la silice, les fibres minérales artificielles ou naturelles, les vapeurs (brouillard d’huile minérale), les fumées de bitume ou de gaz (oxydes de carbone, de soufre ou d’azote) ou encore les pesticides. L’Organisation mondiale de la santé prévoit que la BPCO deviendra la troisième cause de décès dans le monde en 2030.

COMMENT CIRCULER ET RESPIRER ?

  • En voiture, on pollue l’air, mais on le respire aussi ! Habitacle fermé, la voiture est ventilée par une prise d’air située à la hauteur du pot d’échappement de la voiture qui précède. Les filtres laissent passer les particules fines et la densité du trafic, les embouteillages prolongent le temps d’exposition.
  • En bus, l’exposition à la pollution est assez similaire à la voiture, l’habitacle étant également fermé, ce qui empêche également les polluants de s’évacuer. Avec les voies de bus, les temps de trajet sont cependant plus courts.
  • En 2 roues, l’exposition aux polluants est moindre puisque l’on n’est pas dans un espace confiné. Mais si vous circulez dans les bouchons, vous avez quand même le nez dans les gaz d’échappement.
  • À vélo, sur les pistes cyclables, l’air est meilleur qu’au cœur du trafic routier.
  • À pied, sur le trottoir, les concentrations de polluants sont moins importantes que sur la route, et vous pouvez opter pour des rues où il y a moins de circulation.